
- roman
- 23,90 € | 528 pages
- parution le 7 mai 2025
- ISBN 978-2-4876-0011-9
À l’aéroport d’Osaka, deux étrangers, Jake et Mariko, manquent leur avion. Au détour d’un dîner partagé, ils découvrent qu’ils ont tous deux perdu des êtres chers dans des circonstances étrangement semblables, peu après que ces derniers eurent croisé la route d’une femme mystérieuse et diaboliquement séduisante. Cette coïncidence fait naître chez Jake une obsession et il décide de se lancer sur les traces de cette fantomatique inconnue. D’un pays à l’autre se dessine à ses yeux le portrait d’une créature aussi fascinante qu’infernale, laissant dans son sillage des êtres détruits. Aujourd’hui, elle se rapproche d’une nouvelle proie. Reste à savoir si Jake arrivera à la retrouver à temps.
Avec cette œuvre magistrale qui entraîne son lecteur à travers les âges et les continents, Susan Barker crée un univers littéraire aussi obsédant qu’addictif. Au fil des pages, tandis que monte la tension, se présente devant nous le miroir envoûtant des dérives de notre monde.
Susan Barker, autrice d’origine sino-britannique, a grandi dans l’est de Londres. Depuis 2005, elle a publié quatre romans qui ont été sélectionnés pour divers prix littéraires et est pour la première fois traduite en français.- Revue de presseSi les juges du Booker Prize s’ouvrent à la littérature de genre, il ne serait pas trop surprenant de voir L’étreinte des ombres parmi les sélectionnés .Un récit immersif, singulièrement étrange, qui se referme comme un piège autour du lecteur.L’étreinte des ombres vous attrape, vous terrifie et vous séduit totalement. C’est à la fois un thriller, un mystère postmoderne et un conte d’horreur existentiel, mais peut-être plus profondément, un texte sur notre époque.
- Comté de Taos, Nouveau-Mexique, 1982
1er août
Quand je me suis éveillée avant l’aube, le matelas était vide. Enroulée dans un drap, je suis sortie et j’ai trouvé E. assise sur le banc dans la clairière, en train de contempler les monts Sangre de Cristo au-delà des plaines dépouillées par la sécheresse – une ligne hachée sur fond de ciel d’ombres bleues. Elle était nue, presque luminescente dans la pénombre. En entendant mes pas, elle a parlé sans se retourner :
Je n’arrivais pas à dormir.
Le banc de bois a grincé quand je me suis assise près d’elle. J’ai senti qu’elle ne voulait pas être touchée et malgré le froid j’ai contenu mon envie de l’envelopper avec moi sous mon drap, de toucher son visage ou les vagues sombres de ses cheveux. E. ne s’est pas tournée vers moi. Son regard est resté sur les sommets tandis que les constellations s’estompaient dans la nuit finissante.
T : Qu’est-ce que tu regardes ?
E : J’attends Vénus.
T : Ô Venus, beauté des cieux, Vers qui s’élèvent mille temples…
Je me suis interrompue, gênée. J’avais oublié la suite.
E : Sa beauté n’est qu’un masque. Autrefois, Vénus ressemblait à la Terre, mais maintenant c’est un enfer. Ses océans se sont évaporés, ses continents ne sont plus que des roches noires volcaniques et des rivières de lave. L’atmosphère est écrasante, saturée de vapeurs d’acide sulfurique et de dioxyde de carbone. Tu imagines ça ?
T : Pas vraiment, non.
Ces temps-ci, mon imagination s’arrête au bloc de granit d’Oaxaca que j’entame au maillet et burin pendant dix heures par jour dans l’atelier.
E : Vénus tourne à l’envers, dans le sens contraire de la Terre et de toutes les autres planètes. Elle tourne lentement, à la vitesse d’un homme qui marche. Une journée sur Vénus dure plus d’une année. Juste là.
J’ai suivi la direction qu’indiquait le bout de son doigt. Une minuscule sphère de lumière céleste est apparue dans le creux entre deux petits sommets. Irréelle. Hantée. Livide. Nous l’avons contemplée en silence.E : Parfois, je rêve que je suis là-bas. Je marche vers le soleil couchant à la même vitesse que la rotation de Vénus, ce qui fait que le soleil ne disparaît jamais. Il n’en finit pas de se coucher, pour toujours.
Frissonnante, j’ai resserré le drap autour de moi.
T : Tu dois te sentir seule.
Tout en bas du ciel pourpre zébré de violet, Vénus brillait.
E : Non. Pas du tout.Témoignage 1 – Mariko
Tout commence à l’aéroport international de Kansai, à la porte d’embarquement du vol KL378 pour Amsterdam. J’avais traversé en courant le Terminal 1, après m’être aperçu au contrôle de sécurité que mon avion décollait à 17 h 05, et non à 19 h 05 comme je le croyais. En sueur, essoufflé, paniqué par l’écho dans les haut-parleurs de mon nom accompagné des mots « dernier appel », j’ai débouché dans la salle
d’attente vide et couru vers l’hôtesse néerlandaise au comptoir, tendant d’un geste suppliant mon passeport et la carte d’embarquement que j’avais mal lue. Elle m’a annoncé que la porte 27 venait de fermer.
Mais l’avion est toujours relié à la passerelle, a affirmé une voix derrière moi.
Une femme tirant une petite valise à roulettes s’est avancée vers nous dans un cliquètement de talons hauts, sa chevelure noire et lisse luisant sous la lumière qui filtrait par le plafond tout en verre et courbes d’acier du Terminal 1. Son tailleur-pantalon gris, sa blouse de soie et son sac à main en cuir respiraient le luxe de la classe affaires.
Ils sont encore en train de charger les bagages à bord, a-t-elle ajouté.
J’ai jeté un coup d’œil par la paroi vitrée au Boeing 787. Elle avait raison, la passerelle était toujours connectée et les containers de fret étaient en train
de s’élever sous le ventre de l’avion. Les hublots laissaient voir les passagers qui s’avançaient lentement dans le couloir et rangeaient leurs bagages au-dessus d’eux. Tapotant sur son clavier, l’hôtesse a regardé
l’écran, les sourcils froncés, et secoué la tête.
Je vous confirme que la porte est fermée, a-t-elle répété, et que vos bagages enregistrés viennent d’être déchargés. Je peux vous réserver une place sur le prochain vol pour Amsterdam demain. Et modifier vos
correspondances, si elles sont avec notre compagnie.
Mon rythme cardiaque et mon niveau d’anxiété étaient maintenant revenus à la normale et je m’étais résigné à ce changement de programme – après tout, c’était ma faute si j’avais mal lu mon billet.
Cependant, l’autre passagère, malgré sa stature fluette, semblait prête à en découdre. Sous son calme parfait, on voyait à l’étincelle dans ses yeux qu’elle avait l’habitude d’obtenir ce qu’elle désirait.
- roman
- 23,90 € | 528 pages
- parution le 7 mai 2025
- ISBN 978-2-4876-0011-9
- Amour, extérieur nuit
- Après la brume
- Biographie sentimentale de l'huître
- Boa
- Carnet de phares
- Corregidora
- Demi-volée
- Erreur de jugement
- Guérisseuses
- Histoires passagères
- Je suis une île
- L'Enfant rivière
- L'Oiseau rare
- L’Octopus et moi
- La couvée
- La Dent dure
- La Ligne de couleur
- La Puissance cachée des plantes
- La Sauvagière
- Le délicieux professeur V.
- Le Patriarcat des objets
- Les Animaux de ce pays
- Mer agitée
- Mes hommes
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